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ENS Paris-Saclay - Lumière, Matière et Interfaces

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Fusion de microgouttes monodisperses contrôlée optiquement pour l’étude de la dynamique de processus biologiques et (bio)chimiques très rapides.

Sujet de thèse de M. Liheng Xie (directeur de thèse: Abdel El Abed).

Le but de ce projet et de pouvoir fusionner des microgouttes cibles avec une très grande résolution spatio-temporelle (µm-ms) et permettre d'étudier ainsi des dynamiques de processus biologiques ou de réactions chimiques rapides et complexes. Notre approche est basée sur la possibilité de modifier de manière très localisée, grâce à l'utilisation d'un faisceau laser pulsé et focalisé, les propriétés tensio-actives des surfactants photo-actifs permettant de contrôler de manière active la stabilité des microgouttes. Ce travail a démarré avec une collaboration avec des chimistes de l'université Paris Descartes (Peter Dalko, UMR 8601) et se poursuit avec des chimistes et des biologistes de l'ENS Cachan (Rémi Métivier-PPSM, Malcolm Buckle- LBPA).
Nous avons montré au cours du travail avec Peter Dalko que l'utilisation de surfactants photolysables permet de contrôler la fusion de microgouttes avec un temps de l'ordre de 1 s, qui même s'il reste loin de l'objectif initial, un temps de fusion de l'ordre de 1 ms, nous a permis d'ouvrir une nouvelle voie pour l'étude de la stabilité des micro-émulsions et les phénomènes qui les régissent, en particulier les phénomènes de diffusion à l'interface des microgouttelettes avec la phase continue. Ce travail a donné lieu a la publication d'un article paru dans la revue Lab on a Chip en 2016 : Dunkel et al. « Photolysis-driven merging of microdroplets in microfluidic chambers », Lab Chip, 2016, 16, 1484. L'étude menée en collaboration avec R. Métivier repose sur l'utilisation de la photo-isomérisation cis/trans bien connue du groupe azobenzène porté par nos surfactants. Cette collaboration s'intègre dans le cadre d'un projet soutenu par l'Institut d'Alembert, projet MicPAD (Microfluidic and Photochemical Analysis of the Dynamics of nucleoprotein complexes), dont le but final est de comprendre la dynamique de la formation des nucléosomes et de la chromatine en présence de protéines spécifiques (les histones) dans la cellule vivante. Ce travail est développé en collaboration avec l'équipe de Malcolm Buckle, directeur du laboratoire de Biologie et de Pharmacologie Appliquées (LBPA, ENS Cachan).  Elle a permis de démontrer l'intérêt d'utiliser des surfactants photosensibles fluorés dérivés du groupe azobenzène (noté ici KryAzPEG) pour stabiliser des microgouttes produites dans des puces microfluidiques et surtout contrôler optiquement leur fusion grâce à l'utilisation d'un rayonnement UV comme le montre la figure 1.



Fig. 1 :  principe de fusion des microgouttes par le contrôle de l'isomérisation cis-trans de surfactants fluorés portant un groupe azobenzène

A l'instar des dérivées azobenzène, les molécules KryAzPEG peuvent subir une photo-isomérisation cis-trans avec un rayonnement de longueur d'onde adaptée: les molécules transitent en moyenne d'une forme trans dépliée (état le plus stable) vers une forme cis pliée, en absorbant un rayonnement UV.  Inversement, elles passent en moyenne de la forme cis vers la forme trans sous l'effet d'un rayonnement visible (bleue). Nous avons pu montrer que le temps de fusion des microgouttes dépendait fortement de la quantité du surfactant KryAz dissoute dans l'huile fluorée utilisée pour la dispersion des microgouttes. Une durée d'illumination inférieure à 1 seconde a été atteinte grâce à l'utilisation de faibles concentrations en KryAs, de l'ordre de 25 µM.
Nos résultats montrent en particulier que, contrairement à ce qu'on avait imaginé initialement, le mécanisme de fusion des microgouttes n'est pas directement lié à une variation de la tension interfaciale entre les microgouttes et l'huile suite à un changement de conformation trans -> cis, mais plutôt via un mécanisme physique basé sur la création d'une succession de cycles trans-cis-trans générés par les pulses du laser UV (ps) utilisé. Ces derniers engendrent des déformations mécaniques périodiques à la surface des microgouttes qui en s'amplifiant finissent par fusionner les microgouttes. Les résultats que nous avons obtenu à partir de mesures de tension superficielles en fonction de l'aire occupée par molécule à l'interface eau-air dans film monomoléculaire de KryAzPEG  montrent également que la différence de surface occupée par la molécule KryAzPEG entre sa forme trans et sa forme cis est de l'ordre de 0,4 nm2, soit une variation de l'ordre de 10 % de l'aire occupée par molécule de KryAzPEG. Ces résultats font l'objet d'une publication soumise à la revue Lab on a Chip.
Ce projet de recherche constitue le sujet de la thèse que vient de démarrer avec le recrutement de M. Xie Liheng dans le cadre d'une thèse de doctorat financée par une bourse ENS-CSC (China Scholarship Council).



Fig. 2 : Des microgouttes (diamètre ~100 µm) stabilisées par le surfactant KryAzPEG sont générées puis analysées dans des chambres microfluidiques sous à un rayonnement UV (laser ps-365  nm). Les courbes noire (a) et verte (b) correspondent au temps de la première fusion entre deux microgouttes voisines puis avec une 3e microgoutte, pour différentes concentrations du surfactant.